Le choix dans le jeu-vidéo

Le choix dans le jeu-vidéo

Le choix dans le jeu-vidéo

Dans le jeu vidéo il nous est toujours demandé de choisir ce que l'on fait. Terminer rapidement un jeu, choisir quel pokémon prendre... Ce concept de choix et l'interactivité qui en découle donne tout son intérêt au jeu vidéo et nous allons nous intéresser à ce que cela implique.

Qu'est-ce-que le choix dans le jeu vidéo ?

Choisir de courir dans un jeu vidéo, choisir de capturer un pokémon au lieu d'un autre, ou même choisir une fin au périple vidéoludique que nous avons expérimenté quand cela est possible, la notion de choix et de liberté qui en découle est devenu un signe distinctif et intrinsèquement lié à ce média. En effet, dans le cinéma, la notion de choix reste excessivement limitée, et dans la littérature, (hormis "les livres dont vous êtes le héros”) la tentative semble être un échec. Pour autant, la notion de liberté de choix dans le jeu vidéo n'est pas absolue, car nous ne sommes autorisés qu'à faire ce que le designer nous autorise à faire. Dans Pokémon par exemple, pouvons-nous rejoindre la Team Rocket pour voler des pokémons ? Non, car selon la diégèse du jeu, le joueur est censé ne pas rejoindre ses ennemis. Cependant, il existe dans certains cas des moments, souvent clés, où le jeu laisse au joueur le choix à propos de la suite de l’intrigue du jeu vidéo.

Donner au joueur une plume.

Dans de plus en plus de jeux comme The Witcher, Fallout, Fable, … on laisse le choix au joueur d’opter pour une suite d'événements qui influeront sur l’histoire qu’il expérimente. C'est en impliquant systématiquement le joueur dans l'histoire, en lui accordant le pouvoir d'agir sur celle-ci avec SES décisions, que le jeu-vidéo arrive à susciter une réaction et/ou émotion chez le joueur. De cette volonté d’impliquer le joueur dans son histoire, il est apparu comme étant évident de laisser au joueur le « plaisir » de choisir comment allait se dérouler son aventure. De ce fait, dans le début des années 2000, des studios ont laissé aux joueurs le choix d’en faire. Dans Fallout 3, peu de temps après le début de son aventure, le joueur a le choix entre désamorcer ou armer une bombe nucléaire. Les conséquences du choix qui suivra le joueur jusqu’à la fin de son aventure sont souvent récompensées par des statistiques positives ou négatives ainsi que des compétences ou des lignes de dialogues supplémentaires. Il n’y a aucun changement sur l’histoire et souvent les joueurs feront le choix qui leur permettra d’obtenir des avantages en jeu, que ce soit au niveau du gameplay ou de l’esthétique (on te voit Fable…).

Dans d’autres jeux, comme This War Of Mine, la question des choix et de l’implication du joueur est traitée d’une façon différente. En effet, dans Fable les choix n’ont qu’un intérêt limité sur la narration, alors que dans This War Of Mine, les choix accordés aux joueurs auront des effets immédiats sur l’aventure du joueur et surtout des conséquences visibles. Dans ce jeu le joueur contrôle des citoyens qui doivent survivre dans une ville assiégée. Il sera très souvent devant des choix moraux et pour survivre ainsi que finir son aventure, il devra faire des choix difficiles. Pour autant, accomplir trop de mauvaises actions pousse les personnages à avoir des remords et cela rend la progression très difficile, voire impossible.

Là où This War of Mine est différent de Fable et où nos actions bonnes ou mauvaises ne sont finalement que secondaire dans l’intrigue, ici, elles sont l’essence même du gameplay. De plus, en amenant des choix difficiles, ce jeu joue sur une zone de pensées particulière qui peut nous amener à remettre aux questions nos convictions morales. « Si cela devait arriver… ? ». Cette question qui est à la base de ce jeu invite le joueur à remettre en question sa morale lorsqu’il se trouve dans certaines situations données. Ce qui a pour effet (que l’on pourrait considérer comme paradoxal) d’impliquer davantage le joueur dans le scénario que dans le cadre d’un RPG où il aurait décidé de créer un personnage à son image. Finalement, bien que ce ne soit pas lui qui prenne cette décision, le joueur ne peut pas totalement relativiser par rapport à une situation donnée et prendre une décision à la légère comme dans Fable. Il doit agir et subir les conséquences de ses actes. Cet état de fait représente assez bien ce que l’on pourrait nommer « le dilemme du joueur ». Toutefois, il est convenu que les choix disponibles sont donnés par les game designers du jeu et non par notre libre-arbitre. Cela veut dire que, malgré la possibilité de pouvoir influer sur un scénario ou notre expérience de jeu, cette liberté est « encadrée » par les possibilités autorisées par les créateurs de jeu, ce qui montrerait que notre liberté de choix n’est pas absolue.

You can (not) be free to choose.

Si nous ne sommes pas libres de choisir absolument toutes les actions que l'on veut, ce n'est pas tant à cause des limitations purement matérielles, c'est surtout un problème de cohérence scénaristique du jeu. Par exemple, dans Life Is Strange, peu importe ce que l'on fait dans le jeu, nous arriverons toujours au dilemme final. On pourrait essayer de trouver une autre façon de résoudre ce dilemme, mais cela détruirait de façon inévitable la cohérence du jeu et de toute l’aventure que nous avons vécu. De plus, même si on pouvait avoir la liberté totale de choix, cela ne voudrait pas dire que l'on puisse faire tout ce que l'on veut. L'exemple le plus criant est The Stanley Parable, qui explique qu’à cause des intentions du designer, le joueur ne peut pas être totalement libre. Pour ceux qui ne connaissent pas, The Stanley Parable est l'histoire d'une personne nommée Stanley qui peut suivre les directives d'un narrateur afin de vaquer à différentes occupations dans un monde où il est libre. Pour autant, si le joueur décide de n’en faire qu'à sa tête et de ne pas écouter le narrateur, le jeu perd son sens, le narrateur s'embrouille, essaie de tuer Stanley puis déprime. Ce faisant, il laisse Stanley prisonnier du jeu et des choix que celui-ci lui impose. Ce qui est en soi une preuve de la contradiction qui existe autour de la liberté du choix du joueur et des intentions des game designers.

D’ailleurs, dans certains cas, les game designers font fi de cette contradiction en ôtant au joueur le pouvoir d’influencer la narration. Deltarune est un cas assez explicite de ce parti pris. En privant le joueur d’influencer sur l’histoire, le game designer propose une histoire qui ne sera pas éludée par des routes narratives différentes... Sûrement dans le but d’apporter un message pour cette œuvre et aussi de rester le seul orateur de son histoire. Les joueurs n’ont ici que le pouvoir de suivre et d’essayer de comprendre ce que le créateur veut bien leur montrer et cela ne rend pas le jeu moins intéressant, bien au contraire !

Le choix : principe d'immersion et de contrat social.

Finalement, si la liberté de choix dans le jeu vidéo n'existe pas vraiment, pourquoi est-elle si importante ? Tout simplement pour impliquer le joueur dans le jeu vidéo, afin de rendre les décisions qu'il prend plus intenses et plus lourdes de conséquences en le rendant actif dans la narration. Pour faciliter l'immersion du joueur, le choix est une sorte de contrat social entre lui et le Game Designer. C'est une invitation à ne pas être un spectateur passif, à expérimenter une histoire qui sera une expérience unique grâce à nos choix et les implications qui en découleront. Le choix est, pour moi, l'une des plus grandes particularités du média qu'est le jeu vidéo. Permettre au joueur de choisir comment se déroule une histoire, quand c'est bien fait, donne un ton et un goût unique à cette dernière. Cependant, il faut apporter quelques nuances sur ce point, l’absence de choix ne rend pas un jeu plus mauvais, au contraire. Surtout que nous avons vu que, parfois, les choix ne servent pas à grand-chose dans la narration. Ne pas apporter de choix permet aussi de ne pas « dénaturer » une histoire et finalement le contrat social entre le joueur et le game designer lorsque l’on commence à jouer. Car même si nous n’avons pas le choix au cours de l’aventure, ou si nous l’avons d’ailleurs, je pense que le choix le plus important est de choisir de jouer à un jeu, de vivre une aventure, bien que nous n’ayons aucune prise sur l’aventure que l’on vit.

Et vous, avez-vous essayé des jeux où vous aviez le choix sur votre aventure ? Qu’est-ce-que cela vous a fait ressentir ? Racontez-nous vos anecdotes en commentaire ci-dessous.

 
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